Cas de conscience (Policier, adjectif)
Au sein de la jeune garde roumaine, Corneliu Porumboiu s'est révélé comme le plus drôle et le plus cinglant de ses représentants avec 12h08, à l'est de Bucarest. Son deuxième film, Policier, adjectif, semble a priori son exact contraire, au moins pendant sa première partie. L'histoire d'un simple flic de province qui passe ses journées à suivre de loin les agissements de trois jeunes consommateurs de haschich. L'attente est interminable, le ciel est gris, et le film, contemplatif et austère, semble aller nulle part, si ce n'est dans le mur de l'ennui poli. Sans s'animer outre mesure, le récit va cependant devenir signifiant au fil des minutes. Avec, pour point d'orgue, une scène de presque une demi-heure, totalement surréaliste, où le chef de la police et deux inspecteurs vont s'affronter sur des questions de sémantique. Qu'est ce la conscience ? Peut-on avoir un cas de conscience, en tant que policier ? Et la loi dans tout cela ? Bref, nous voici en plein Kafka, avec une délicieuse ironie sous-jacente, qui permet de retrouver le Porumboiu critique lucide de la société roumaine. Cette simple scène éclaire a posteriori tout le dispositif d'un film épuré et d'une suprême intelligence. La seule condition, pour l'apprécier à sa juste valeur, est de ne pas se laisser abuser et décourager par la languissante première heure. Ce n'est pas un film drôle, mais c'est à coup sûr un drôle de film.