Encore des films à La Rochelle (7)

Episode 6 : Tous des documenteurs !

- Et c'est ici précisément que nous nous sommes rencontrés. Etrange.
- Non, au contraire, c'est tout à fait normal. Nos trajectoires ordinaires ne se rencontrant pas, c'est dans l'extraordinaire que se situent nos points d'intersection. (Dialogue de Ma nuit chez Maud de Rohmer).

A l'heure où l'orage éclate au-dessus de La Rochelle, il est temps de faire le bilan de cette journée, marquée par l'abondance de docu-fictions, qui laissent souvent le docu entre deux chaises.

11h00 : pas bien dormi. Malgré un bon petit-déjeuner, j'ai la bouche pâteuse et les idées pas en face des trous pour voir Pudena (2009) d'Anastasia Lapsui et Markku Lehmuskallio, deux documentaristes finlandais qui évoquent l'époque (il y a une quarantaine d'années) où le mode de vie des Nenets s'est transformée avec la russification et la scolarisation des enfants. Une docu-fiction assez plate qui m'invite à une douce somnolence.
Je retrouve des forces avec un croque-madame avalé dans le célèbre Café de la paix, quartier général de Simenon pendant la période 1931-1944. L'écrivain, pipe à la bouche, y venait volontiers se mêler aux joueurs de cartes de ce café ouvert depuis la fin du 18ème siècle. Il lui arrivait fréquemment de s'y rendre à cheval depuis sa propriété de Marsilly, et le patron de l'estaminet avait fait poser un anneau sur la façade de façon à ce que le grand Georges puisse y attacher sa monture. Le Café de la paix est le lieu central de son roman Le testament Donnadieu.


14h00 : mon troisième et dernier Etaix de la semaine, dans une salle surchauffée (et la clim' bord.. !) : Tant qu'on a la santé. Toujours le même sentiment, des cascades de gags dignes des plus grands burlesques américains, mais aussi un manque de fluidité et de consistance dans le récit. N'est pas Tati ou Chaplin qui veut. Il ne me restera plus qu'à voir Le soupirant et Pays de cocagne (documentaire) pour avoir fait le tour de la carrière d'Etaix qui, après quarante de silence forcé, a annoncé un projet en cours avec le fidèle J. Claude Carrière.

Petite pause promenade. J'achète une édition de Stefan Zweig avec 24 heures de la vie d'une femme et d'autres récits .... Lecture, décontraction des muscles, galopin en terrasse ...

20 heures : sandwich et galopin (encore !) avant la soirée Conseil Général, dans la grande salle du Festival. Pedro Gonzalez-Rubio, cinéaste mexicain venu du documentaire (oups) vient nous présenter Alamar, son premier long-métrage. Très sympathique d'ailleurs, le réalisateur, qui regrette la disparition progressive du métier de pêcheur dans la mer des Antilles. Son film, minimaliste sur le plan scénaristique, est surtout une ode aux travailleurs de la mer et à l'une des plus grandes barrières de corail de la planète. De bien belles images mais d'histoire, point, ou si peu. Ce n'est pas Le grand bleu mexicain, mais pas loin. A découvrir au cinéma à partir du 1er décembre.


22 heures : avec deux festivalières que je ne connais ni d'Eve ni des dents, on s'amuse à faire la course pour rejoindre une salle deux cent mètres plus loin où va être diffusé Mon bonheur (My joy), le film ukrainien qui a vidé en un rien de temps la salle cannoise où il est passé durant la compétition. Avant la projection, on nous prévient que le film est beau mais... difficile. Beaucoup trop sans doute pour un bon paquet de spectateurs qui fuiront bien avant la fin. Ce en quoi ils ont eu tort car le film de Sergei Loznitsa (qui vient du ... documentaire) a des moments extraordinaires et une manière de travailler la pâte humaine et de densifier son atmosphère qui sont étonnants (à la façon d'un Tarkovski, pour ne citer qu'une référence). Le problème, c'est le scénario. Il y a bien une intrigue et un personnage central, qu'on retrouve à de nombreuses reprises, mais il y aussi des scènes venues de nulle part, situées ailleurs dans l'espace temps (la deuxième guerre mondiale) qui opacifient singulièrement le propos. C'est assez violent, aussi, avec une morale qui pourrait être : tout le monde est pourri dans ce monde putride (ou l'inverse). Ca laisse dubitatif, surtout après minuit. Une certitude, quand même, Loznitsa est un sacré cinéaste, de la race d'un Seidl ou d'un Zviaguintsev, par exemple.
Un film à voir dans toutes les bonnes pharmacies, le 17 novembre.


Bon, demain, je retrouve Garbo, Kazan, plus trois avant-premières française, sud-africaine, et thaïlandaise. Docteur, est-ce que c'est grave ?

See you, lecteurs.



09/07/2010
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