Epopée en Beauce (Dans la cathédrale)
Au fond, Jean, le héros de Dans la
cathédrale mène une vie assez sinistre, banale à en pleurer et sans
plaisirs majeurs. N'est-ce pas le portrait de l'homme moderne que
brosse ainsi Christian Oster avec l'indécision et l'indifférence comme
traits de caractère principaux ? Jean s'enfuit mais, là aussi, c'est
pathétique, pas au Brésil ou en Australie, non, quelque part en Beauce
(le symbole parfait de la platitude), non loin de Chartres. Un
enterrement, une rupture téléphonique, un accident de vélo, quelques
heures à discuter avec un agriculteur, juché sur une
moissonneuse-batteuse, telles sont quelques unes des péripéties de ce
roman qui serait triste comme la mort s'il n'y avait ce style
inimitable d'Oster, cette dérision permanente, ce sens de l'absurde
(pas loin de provoquer notre hilarité). Ainsi, un trajet dans un car
Transbeauce devient une sorte d'épopée comme si le narrateur remontait
l'Orénoque. Trop drôle ! Et puis l'auteur pratique toujours l'art de la
digression avec une maîtrise confondante et une facilité déconcertante.
142 pages et puis tout s'arrête. Ou tout commence ? Comment savoir avec
ce diable d'Oster qui, au fil des livres, tisse une toile où l'animal
pris au piège a de plus en plus de mal à se débattre. Un animal appelé
également Homme.