Un conte, ne vous déplaise (Gainsbourg, vie héroïque)
La vie (héroïque ?) de Gainsbourg vue par le jeune surdoué de la BD, Joann Sfar, ça donne envie. Présentée comme un conte, ne vous déplaise, et non comme un classique biopic (l'horrible terme), l'entreprise est séduisante et plutôt adaptée au personnage, insaisissable et devenu sulfureux. La jeunesse de Gainsbourg (avec l'apparition de son double) constitue la meilleure part du film, sensible et vibrante. La suite est très inégale, quoique toujours élégante et interprétée par un Eric Elmosnino sidérant, nourrie des grandes rencontres féminines du chanteur. Si la liaison avec Bardot est incandescente (Casta, divine), les autres épisodes sont soit bâclés (Gréco, Bambou), soit trop convenus (Birkin), voire grotesques (Gall). A mesure que l'artiste se métamorphose en faiseur de tubes et se laisse avaler par son côté Gainsbarre, Sfar semble se désintéresser de son personnage et comme pressé d'en finir (voir les scènes jamaïcaines et la polémique autour de sa Marseillaise). Quant à ses dernières années, elles sont simplement escamotées, la déchéance etc. On était prévenu, ce Gainsbourg rêvé manque d'aspérités et se feuillette comme un livre pailleté où les jolies femmes se pressent, énamourées, à ses pieds. Restera la vision du petit garçon frondeur, portant l'étoile juive dans les rues de Paris, persuadé de devenir plus tard un grand artiste. Lucien Ginzburg aurait sans doute, lui aussi, retenu cette image indélébile.
PS : le film est dédié à Lucy Gordon qui, avant d'incarner Jane Birkin, était merveilleuse dans Les poupées russes. Elle s'est suicidée en mai dernier. Paix à son âme.
PS : le film est dédié à Lucy Gordon qui, avant d'incarner Jane Birkin, était merveilleuse dans Les poupées russes. Elle s'est suicidée en mai dernier. Paix à son âme.