Boulevard périphérique (Potiche)

Un bon film, mais pas la tranche de rigolade promise par la bande-annonce. Avec Ozon, la pièce de Barillet et Grédy, devient du boulevard ... périphérique. Il y a la patte du réalisateur qui change un peu la donne et transforme la farce en satire. La trame générale est cependant conservée, une vraie machine de guerre en terme de divertissement, dont le seul défaut est son côté mécanique, bien huilée, c'est entendu, mais on devine les rouages. Le côté feuilletonesque de l'affaire rappelle Sitcom, mais dans ce film-la, Ozon jouait la provocation, il s'est assagi depuis, normal, c'est un réalisateur installé désormais, qui tourne à la cadence d'un Woody Allen.
Potiche se situe donc en 1977, au coeur des années Giscard, avec une décoration qui peut sembler kitsch (nostalgique pour les plus âgés) mais elle est assez réaliste, y compris avec ses improbables motifs de papier peint. Les coiffures à la Farah Fawcett, les pulls-overs à losanges, Michèle Torr et Il était une fois en fond sonore, c'est mieux qu'une reconstitution. On y est.
Comme d'habitude, Ozon se révèle un formidable directeur d'acteurs. Le jeu de Luchini peut agacer, mais il lui a été demandé d'en faire trop, fallait pas lui dire deux fois. Bouffon, d'accord, mais sans modération, c'est voulu, et son interprétation sert de contrepoint à ses petits camarades. Ce qui est intéressant, c'est que son personnage, comme tous les autres, évolue tout au long du film. Au final, il n'est plus le patron cynique et arrogant du début. Même cas de figure pour Viard, Renier ou Godrèche. C'est encore plus vrai pour Depardieu, on a retrouvé le grand Gérard, et évidemment pour Deneuve, une Potiche qui a jeté le vase mais pas les fleurs qui sont dedans.
Malin, Ozon, qui joue avec la mythologie du couple du Dernier métro, qui a vieilli, soit, mais qui garde une complicité qui est aussi dans la mémoire vive des cinéphiles. Catherine Deneuve ? Elle n'a pas la vis comica de Maillan et ne cherche pas à rivaliser sur ce plan-là. Admirez l'artiste, la finesse de sa composition est un régal, aussi crédible en bobonne qu'en nymphomane repentie ou en femme politique d'avenir. Il l'aime sa Catherine, Ozon, et cet amour transparait clairement sur la pellicule.
Comme toujours chez Ozon, il y a de nombreuses lectures possibles. Tout le monde aura relevé les ressemblances voulues avec notre époque, c'est parfois surligné, d'ailleurs. En ce sens, il s'agit aussi d'un film politique, utopiste, jusqu'à sa conclusion culottée et irrésistible. "C'est beau la vie", chante Deneuve, reprenant Ferrat. Au début, la même fredonnait du Michèle Torr. Sacrée progression, non ? Manière de dire que rien n'est figé et que toute société est amenée à muter. Pour le meilleur ou pour le pire. Manifestement, le cinéaste a choisi son camp.



15/11/2010
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