La fille de la Croix-Rouge (Mon enfant de Berlin)

C'est l'histoire d'une jeune femme qui, entre 1944 et 1947, va vivre les plus belles années de son existence. Dans Mon enfant de Berlin, Anne Wiazemsky raconte le quotidien d'une fille de la Croix-Rouge, un portrait d'autant plus troublant qu'il s'agit de sa propre mère. Oui, troublant, et beau aussi, parce que derrière l'écriture, on  pénètre dans l'intimité de la femme, autant que de la romancière, née à Berlin de l'amour fusionnel entre Claire et Wia. Guerre et amour : tout est là ; l'art de Wiazemsky est de parler avec légèreté des choses graves et avec sérieux des choses (presque) sans importance. C'est une forme de pudeur et d'élégance, qui est précieuse. Et que dire du personnage de Claire, qui tangue entre insouciance et anxiété, dont la peur de (mal) vivre n'a d'égal que son inconscience face à la mort. Le trait est fin, jamais appuyé, mais cette femme, si difficile à comprendre, elle est bien vivante, dans l'écriture souple et gracieuse de la romancière. Il faudrait évoquer la figure de Wia, aussi, avec ses origines russes et aristocratiques, et surtout cet amour fou qui, on s'en doute, ne durera que le temps d'une parenthèse enchantée. Dans un Berlin affamé et dévasté, deux jeunes gens vivent une passion qui est tout sauf égoïste. Jamais, Anne Wiazemsky ne cherche le mélodrame, ce n'est pas son genre. C'est d'autant plus bouleversant quand, 60 ans plus tard, l'enfant de Berlin revient sur un passé qu'elle ne connait que par de maigres témoignages et des lettres, émouvantes dans leur banalité. Le livre d'Anne Wiazemsky est comme un album de photos un peu jauni par le temps, on le referme avec mélancolie, des images pleins la tête pour longtemps.




16/09/2009
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