Une bougie dans la tempête (Poetry)

Autant Secret Sunshine imposait naturellement son émotion, autant Poetry, le nouveau Lee Chang-dong, moins immédiat et plus épuré, contourne les voies classiques du mélodrame pour revêtir la forme d'une sorte de requiem dont la grandeur n'est visible, pleinement, qu'au bout des 2h20 de projection. Mija est une grand-mère pimpante, en apparence, dont la quête est de (re)découvrir la beauté du monde. Elle cherche sa voie dans la poésie, à tâtons mais avec obstination, alors que l'univers qui l'entoure se fissure : sa santé (Alzheimer), les agissements de son petit-fils, en partie responsable du suicide d'une jeune fille, la cupidité, l'indifférence ou la grossièreté de son entourage. Mija est une bougie qui brûle encore en pleine tempête, droite, à peine tremblante et digne. Cette grand-mère, qui n'est pas sans rappeler celles du dernier film de Mendoza (Lola), est incarnée par une actrice sublime, la plus grande star de l'histoire du cinéma coréen, Yoon Jung-hee, inactive depuis plusieurs années. Son visage aux reflets changeants, comme un paysage d'automne, est en lui-même l'élément le plus poétique du film. Que les mots, aussi évocateurs soient-ils, ne sauraient décrire. Poetry, film rare dans le cinéma d'aujourd'hui, par son caractère contemplatif et sa lente linéarité, ne se donne qu'en partie lors d'une première vision. Il faudrait y retourner encore et encore pour en épuiser les richesses cachées.



26/08/2010
7 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 9 autres membres