Encore des films à La Rochelle (8)
Episode 7 : La tête sans les jambes.
Antépénultième jour de festival. Avant toute chose, un petit-déjeuner avec vue sur la mer ou sur cour, ça dépend des jours.
11h00 : mon dernier ciné-concert avec La chair et le diable (Clarence Brown, 1927). De bons moments de comédie dans ce film sur l'amitié masculine qui est mise à mal par l'irruption d'une femme fatale. Greta Garbo joue cette salope (désolé, c'est le mot qui convient) sans trop de conviction, le rôle n'est pas très bien écrit, il faut dire. Le final est mélodramatique à souhait, l'amitié virile triomphant alors que l'infâme femme se noie dans un lac gelé sans que personne n'y trouve à redire. Quelle morale !
13 heures : je me rends au pince-fesses de l'hôtel de ville. J'ai raté les discours, j'engloutis petits fours et sirote quelques cocktails (non alcoolisés) en cherchant des people dans la salle. A part JF Stevenin, pas grand monde de connu dans cette assemblée. Je complète ce "déjeuner" par deux boules de glace achetés chez le célèbre Ernest. j'hésite entre speculoos et coquelicot, et choisis deux parfums plus classiques (je sais, c'est palpitant, je vous épargne les détails).
J'ai décidé de me priver de la séance de 14h30, tant pis pour A l'est d'Eden, que je présume avoir beaucoup vieilli. J'ai bien fait car je rencontre ainsi par hasard le grand JJ Bernard, l'homme de CinéClassic, avec lequel s'engage une longue conversation cinéphile. Il m'apprend que la programmation annuelle de sa chaîne est déjà calée (dans l'ordre, des intégrales Dr Mabuse, Clouzot, Ophüls et Dreyer sont prévues) et qu'il vient de terminer un documentaire sur Lubitsch qui sera bientôt dévoilé au prestigieux festival de Locarno. Ce type est vraiment sympathique, ouvert, pas blasé pour un sou et, à l'occasion mauvaise langue concernant ses congénères critiques. Une belle rencontre qui ensoleille mon festival.
17h30, c'est le moment d'enchaîner trois films jusqu'à minuit. Je me suis aperçu que c'étaient les moments où j'étais le plus réceptif et le plus à même de passer d'une oeuvre à l'autre sans risque de jet lag. Je débute par Le secret de Chanda, un film sud-africain d'Oliver Schmitz (réalisateur de Hijack Story). J'aurais aimé en dire du bien car le thème est plus qu'intéressant (les ravages du sida) mais le traitement est fort décevant. Trop de misérabilisme, une accumulation de malheurs autour de la jeune héroïne (ses parents meurent, sa meilleure copine se prostitue etc.) et une esthétisation assez mal venue. Le vrai sujet : comment les familles transforment les causes de décès de leurs proches pour éviter l'ostracisme, est maladroitement abordé. Typiquement, le film qu'on aimerait aimer mais qui joue tellement le chantage à l'émotion que c'en est gênant (il y a même une sorte de happy end). Ceci dit, nuançons, avec mes gros sabots de nanti du monde occidental, je n'ai pas la sensibilité d'un noir sud-africain qui retrouve là des éléments de son quotidien. Je serai curieux de savoir comment le film a été reçu dans son pays. Le secret de Chanda sort dans les salles française le 1er décembre.
Tout autre chose avec La tête ailleurs, adapté du roman Voyage, voyages de Laurent Graff (pas lu). L'histoire d'un croupier de casino qui rêvera de partir pour un grand voyage tout au long de sa vie. Il a la tête à partir, mais visiblement pas les jambes. Le film va de sa quarantième année jusqu'à la fin de sa vie et procède par petites touches drolatiques et amères qui rappellent le style des romanciers des Editions de Minuit (Echenoz, Viel, Oster ...). Les spectateurs ont fait un triomphe mérité à ce "petit" film, tourné entre Rochefort et Fouras, devant son metteur en scène, Frédéric Pelle, qui le présentait pour la première fois au public. Il devrait sortir à la rentrée, sans doute en octobre, et je lui souhaite un beau succès.
La séance de 22 heures est propice aux films énigmatiques. Celui de ce soir, Mundane History, de Anocha Suwichakornpong, en est un, de la plus belle eau. Une trame réaliste et psychologique, a priori : la relation entre un jeune handicapé moteur et son infirmier. Mais la réalisatrice thaïlandaise se met soudain à délivrer des visions hallucinées et cosmogoniques qui laissent pantois (euphémisme). Encore une histoire de tête sans les jambes qui, cette fois, se perd dans un délire inexplicable. Face aux autre cinéastes, Suwichakporong (ne retenez pas son nom), c'est vraiment la thaïe en dessous. Le film n'a pas de date de sortie française, pour l'instant.
Au programme, demain : du libanais, du mexicain, du français et du hongrois (à 22 heures, je prépare mon masque et mon tuba).
See you, lecteurs.
Antépénultième jour de festival. Avant toute chose, un petit-déjeuner avec vue sur la mer ou sur cour, ça dépend des jours.
11h00 : mon dernier ciné-concert avec La chair et le diable (Clarence Brown, 1927). De bons moments de comédie dans ce film sur l'amitié masculine qui est mise à mal par l'irruption d'une femme fatale. Greta Garbo joue cette salope (désolé, c'est le mot qui convient) sans trop de conviction, le rôle n'est pas très bien écrit, il faut dire. Le final est mélodramatique à souhait, l'amitié virile triomphant alors que l'infâme femme se noie dans un lac gelé sans que personne n'y trouve à redire. Quelle morale !
13 heures : je me rends au pince-fesses de l'hôtel de ville. J'ai raté les discours, j'engloutis petits fours et sirote quelques cocktails (non alcoolisés) en cherchant des people dans la salle. A part JF Stevenin, pas grand monde de connu dans cette assemblée. Je complète ce "déjeuner" par deux boules de glace achetés chez le célèbre Ernest. j'hésite entre speculoos et coquelicot, et choisis deux parfums plus classiques (je sais, c'est palpitant, je vous épargne les détails).
J'ai décidé de me priver de la séance de 14h30, tant pis pour A l'est d'Eden, que je présume avoir beaucoup vieilli. J'ai bien fait car je rencontre ainsi par hasard le grand JJ Bernard, l'homme de CinéClassic, avec lequel s'engage une longue conversation cinéphile. Il m'apprend que la programmation annuelle de sa chaîne est déjà calée (dans l'ordre, des intégrales Dr Mabuse, Clouzot, Ophüls et Dreyer sont prévues) et qu'il vient de terminer un documentaire sur Lubitsch qui sera bientôt dévoilé au prestigieux festival de Locarno. Ce type est vraiment sympathique, ouvert, pas blasé pour un sou et, à l'occasion mauvaise langue concernant ses congénères critiques. Une belle rencontre qui ensoleille mon festival.
17h30, c'est le moment d'enchaîner trois films jusqu'à minuit. Je me suis aperçu que c'étaient les moments où j'étais le plus réceptif et le plus à même de passer d'une oeuvre à l'autre sans risque de jet lag. Je débute par Le secret de Chanda, un film sud-africain d'Oliver Schmitz (réalisateur de Hijack Story). J'aurais aimé en dire du bien car le thème est plus qu'intéressant (les ravages du sida) mais le traitement est fort décevant. Trop de misérabilisme, une accumulation de malheurs autour de la jeune héroïne (ses parents meurent, sa meilleure copine se prostitue etc.) et une esthétisation assez mal venue. Le vrai sujet : comment les familles transforment les causes de décès de leurs proches pour éviter l'ostracisme, est maladroitement abordé. Typiquement, le film qu'on aimerait aimer mais qui joue tellement le chantage à l'émotion que c'en est gênant (il y a même une sorte de happy end). Ceci dit, nuançons, avec mes gros sabots de nanti du monde occidental, je n'ai pas la sensibilité d'un noir sud-africain qui retrouve là des éléments de son quotidien. Je serai curieux de savoir comment le film a été reçu dans son pays. Le secret de Chanda sort dans les salles française le 1er décembre.
Tout autre chose avec La tête ailleurs, adapté du roman Voyage, voyages de Laurent Graff (pas lu). L'histoire d'un croupier de casino qui rêvera de partir pour un grand voyage tout au long de sa vie. Il a la tête à partir, mais visiblement pas les jambes. Le film va de sa quarantième année jusqu'à la fin de sa vie et procède par petites touches drolatiques et amères qui rappellent le style des romanciers des Editions de Minuit (Echenoz, Viel, Oster ...). Les spectateurs ont fait un triomphe mérité à ce "petit" film, tourné entre Rochefort et Fouras, devant son metteur en scène, Frédéric Pelle, qui le présentait pour la première fois au public. Il devrait sortir à la rentrée, sans doute en octobre, et je lui souhaite un beau succès.
La séance de 22 heures est propice aux films énigmatiques. Celui de ce soir, Mundane History, de Anocha Suwichakornpong, en est un, de la plus belle eau. Une trame réaliste et psychologique, a priori : la relation entre un jeune handicapé moteur et son infirmier. Mais la réalisatrice thaïlandaise se met soudain à délivrer des visions hallucinées et cosmogoniques qui laissent pantois (euphémisme). Encore une histoire de tête sans les jambes qui, cette fois, se perd dans un délire inexplicable. Face aux autre cinéastes, Suwichakporong (ne retenez pas son nom), c'est vraiment la thaïe en dessous. Le film n'a pas de date de sortie française, pour l'instant.
Au programme, demain : du libanais, du mexicain, du français et du hongrois (à 22 heures, je prépare mon masque et mon tuba).
See you, lecteurs.