Pathos et Thanatos (Au-delà)
Eastwood a 80 ans et son coeur s'est attendri
avec l'âge. Exit le rebelle aux idées douteuses, bonjour l'humaniste qui
donne dans le mélo. Il faut s'y faire : Dirty Harry n'est plus qu'un
souvenir (son compte lui a été réglé, et de quelle façon, dans Gran
Torino) et Nice Clint a pris le relais. Au-delà se présente comme un
film sur la communication entre les vivants et les défunts et, partant,
sur ce qu'il peut bien y avoir après la mort. Un thème très glissant
avec lequel le réalisateur compose en scindant son récit en trois
histoires, aucune d'elle ne pouvant fonctionner seule, et se rejoignant,
de façon artificielle et hollywoodienne, dans un final béat
d'optimisme, euphorisant, mais un tantinet démagogique, si je puis me
permettre. Le problème majeur vient de la partie française, sans grand
intérêt, et où Cécile de France peine à trouver sa place (la scène de
tsunami, d'entrée, est pourtant remarquable). Le segment britannique est
touchant, normal quand il est question d'enfance, mais tout de même
très convenu. Reste le cas du médium américain, qui considère son don
comme une malédiction, qui devrait être le plus sujet à caution et qui,
miracle, est de loin le plus convaincant et exhale les plus belles
émotions (les scènes de "consultation"), dans un registre intimiste. Il y
a un responsable à cela, c'est Matt Damon. Il est formidablement
charismatique dans un rôle casse-gueule par excellence et tire, par sa
seule présence, le film vers le haut. Une performance paranormale !
Moyennant quoi, tous comptes faits, malgré le côté "Pathos et Thanatos
sont dans un bateau", Eastwood finit par retomber sur ses pieds et ne
mérite pas d'être pendu haut et court pour mièvrerie aggravée. Le coup
n'est passé pas loin, quand même, très cher Clint. Son prochain projet,
une évocation de la vie de J. Edgar Hoover, devrait nous valoir un film
d'une toute autre tenue. On parie ?