Plaidoyer pro domo (Un roman français)
"Certes, ma vie n'est pas plus intéressante que la vôtre, mais elle ne l'est pas moins." C'est une petite phrase qui peut paraître anodine, mais si elle est écrite à la page 269 d"Un roman français", c'est qu'elle est à l'image de tout le livre du célèbre people/écrivain, Frédéric Beigbeder (rayez la mention inutile, si vous le souhaitez) : une tentative quasi-désespérée de paraître sincère et, partant, de s'excuser de l'image de dandy jouisseur, arrogant et junky, qu'il trimballe depuis des années et qui, bien entendu, n'est qu'un masque puéril dissimulant un coeur en lambeaux. Beigbeder est assez convaincant sur le fond, quoique ses arguments, pour expliquer son malaise auto-destructeur, soient assez chétifs : le divorce de ses parents, un frère presque parfait, une enfance trop heureuse pour laisser des souvenirs. Un roman français est un plaidoyer pro domo, qui ne changera sans doute pas l'opinion que chacun s'est fait de lui, plutôt positive ou carrément hostile (ceux qui ne l'aiment pas ne liront pas ce livre, et pourquoi le feraient-ils ?). Honnêtement, ce bouquin a un certain style (à défaut d'un style certain) et une élégance dans l'auto-flagellation. En même temps, il souffre d'un certain nombre de maux récurrents chez Beigbeder : des citations toutes les 5 pages (de Schopenhauer à Virgile), des madeleines de Proust toutes les 10 (de Pif Gadget à Kraftwerk), des excès typographiques toutes les 20 (ah, ces phrases en MAJUSCULES !)... L'entreprise d'auto-réhabilitation est un peu vaine, c'est indéniable, mais elle est à l'image du personnage, un homme de près de 45 ans qui dit être enfin devenu adulte après sa garde à vue, traumatisante, et l'écriture de ce livre, rédemptrice. On n'est pas obligé de le croire, évidemment ; mais on peut aussi lui accorder le bénéfice du doute.