Moisson de vieux films (Mai/4)


Sandra (Vaghe stelle dell'orsa, Luchino Visconti, 1965)
Vu il y a fort longtemps et peu apprécié à ce moment-là. Une nouvelle vision s'imposait. Après la splendeur du Guépard, Visconti revient au noir et blanc et filme une histoire très sombre dans une villa toscane. Atmosphère morbide, tragédie grecque à base d'inceste, de trahison et de dégoût, Sandra exacerbe les défauts (moins voyants dans d'autres films) du cinéaste, en particulier un certain formalisme et un excès d'effets mélodramatiques. Il y a cependant quelque chose de fascinant dans ce ratage (pas d'accord avec certains viscontiens prétendent qu'il s'agit d'une de ses oeuvres majeures), comme un écho aux thèmes du film et à la personnalité trouble du personnage de Sandra, que Claudia Cardinale joue avec une sensualité, euh, troublante.

Le bonheur (Agnès Varda, 1965)
Le film a été fustigé à l'époque par son "amoralité". Ce qui était subversif, c'est qu'aimant Émilie, le héros (J.C Drouot, célèbre Thierry la Fronde, pour la première fois au cinéma) n'en aime pas moins Thérèse : il agit par addition et ne comprendrait pas qu'il faille choisir. D'ailleurs sa bonne foi est si entière qu'il parle à Émilie de Thérèse, mais surtout à Thérèse d'Emilie, lors d'un de leurs dimanches à la campagne. Et que dire de la fin, une image du bonheur comme si rien ne s'était passé. Beaucoup de choses à dire sur la forme, un film Nouvelle Vague dans ses cadrages (du Godard "light") et son montage (l'audace des fondus au rose). Et sur la musique de Mozart, omniprésente. La mise en scène de Varda, cinéaste dentellière, est tellement délicate. 45 ans après, le film reste toujours aussi, euh, troublant.

Les cavaliers (The Horsemen, John Frankenheimer, 1970)
Luxuriante adaptation du roman de Kessel. Situé dans l'Afghanistan d'avant la guerre civile et l'invasion soviétique, le film est davantage qu'un grand spectacle hollywoodien à perdre Kaboul. L'affrontement psychologique entre un père et un fils (Palance/Sharif), les paysages somptueux, la fascination pour les chevaux, l'identité morcelée du pays sont autant de thèmes qui enrichissent cette oeuvre au ton résolument pessimiste. Et Omar Sharif trouve un rôle qui lui va comme un afghan.

Elise ou la vraie vie (Michel Drach, 1970)
Adaptation du roman de Claire Etcherelli, prix Femina 1967. L'histoire décrit le monde ouvrier (les usines Renault) de la fin des années 50 et la romance d'une jeune fille (superbe Marie-José Nat) avec un militant algérien. Le film est sobre et intense, avec plusieurs scènes de rafle (nous sommes en pleine guerre d'Algérie) impressionnantes. C'est le racisme quotidien des français qui est ici montré, à un point qui dépasse l'imagination (y a t-il exagération, j'en doute, mais seuls ceux qui étaient adultes à l'époque pourraient en témoigner). Un vrai choc, en tous cas.


Mon père et nous (Life with Father, 1947, Michael Curtiz)
Une comédie familiale dont l'origine théâtrale est assez évidente. La mise en scène de Curtiz est statique mais les dialogues et les situations sont irrésistibles avec un William Powell inénarrable en tyran domestique que sa femme essaie de faire baptiser à tout prix. A noter les brèves scènes d'une Liz Taylor toute jeune et toute timide (quels yeux !). Par ailleurs, reconstitution impeccable du New York de 1880. Ce mix de Feydeau et d'Henry James est en définitive parfaitement spirituel et agréable à regarder.






23/05/2010
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